LTDH: l'Etat doit réagir aux accusations du collectif de défense
La Ligue Tunisienne de Défense des Droits de l'Homme (LTDH) a demandé ce mercredi aux institutions de l'Etat, notamment la présidence de la république et du gouvernement ainsi que les ministères de la défense, de l'intérieur et de la justice de "répondre immédiatement aux affirmations rapportées lors de la conférence de presse tenue par Collectif de défense de Chokri Belaid et Mohamed Brahmi, assassinés respectivement le 6 février 2013 et le 25 juillet 2013, dévoiler toute la vérité (sur l'affaire), éclairer l'opinion publique et la rassurer".
Dans une déclaration publiée mercredi, la Ligue a indiqué que "la question la plus alarmante est l'affirmation par le collectif de défense de l'implication d'un appareil de renseignement secret appartenant à un groupe politique tunisien dans l'assassinat des deux martyrs Belaid et Brahmi".
La LTDH, membre du même collectif de défense, a énuméré "les données volumineuses rapportées lors de la conférence de presse dont l'existence d'un appareil de renseignement secret appartenant à un groupe politique tunisien opérant sous les ordres de l'organisation internationale des Frères Musulmans impliquée dans des affaires de terrorisme" et "l'engagement par cet appareil de sécuritaires et citoyens pour espionner des pays comme l'Algérie, les USA et la France à partir du territoire tunisien".
Parmi les données citées par la Ligue, "la détention par cet appareil d'un volume considérables de documents volés des ministères de la justice et de l'intérieur et d'outils sensibles et sophistiqués d'écoutes et de photographie ainsi que le lien d'un des membres de l'appareil avec des ministres du gouvernement de la Troika (formé alors des partis Ennahdha, Attakatol et le Congrès), et notamment la justice et l'intérieur".
Me Ridha Raddaoui, membre du collectif de défense dans l’affaire des deux assassinats, a affirmé lors d'une conférence de presse tenue lundi détenir des informations d’"une importance capitale" sur cette affaire, citant notamment la détention par le dénommé Mustapha Khedr de documents en rapport avec le dossier de ces assassinats.
"Mustapha Khedr aurait été responsable de cette structure qui appartenait au Mouvement Ennahdha. Il aurait été en contact direct avec les hauts dirigeants du Mouvement et plus particulièrement avec le président du parti, Rached Ghannouchi et le président du bloc parlementaire du Mouvement, Noureddine B’hiri", a-t-il expliqué.
"Khedr aurait été chargé de répondre au courrier adressé à Ali Laarayedh, alors qu’il était ministre de l’Intérieur", a-t-il ajouté.
"Mustapha Khedr aurait été également chargé d’espionner les appareils étrangers et plus particulièrement l’appareil militaire et la présidence de la République algériens ainsi que l’ambassade des Etats Unis à Tunis", a-t-il poursuivi.
"Sur instructions de Rached Ghannouchi qui est le président de cette structure, Khedr aurait été en contact avec le Mouvement des frères musulmans en Egypte", a-t-il enchaîné.
Selon Me Raddaoui, "Mustapha Khedr détiendrait une liste nominative de 400 agents de police et leur numéro de téléphone. Ils auraient pour mission d’établir des rapports quotidiens à la structure".
Il a également souligné l’existence de deux autres listes nominatives d’un groupe de délinquants déployés dans le district du Grand Tunis et qui auraient pour tâche de rendre des rapports quotidiens à la même structure.
Riadha Raddaoui a aussi fait état de la relation entre le dénommé Khedr et les personnes impliquées dans l’assassinat de Belaïd et Brahmi.
"Khedr aurait été le coordinateur des opérations d’assassinat", a-t-il souligné, faisant remarquer que les autorités judiciaires détiendraient des pièces qui confirment un ensemble d’informations.
En réponse à ces accusations, le dirigeant au Mouvement Ennahdha, ministre de l’Intérieur et chef du gouvernement sous les gouvernements de la Troïka 2011-2013, Ali Laârayedh, a démenti mardi l’existence de toute structure secrète appartenant au Mouvement Ennahdha.
"Le Front populaire est passé maître dans les manœuvres dilatoires, la diffamation et les accusations calomnieuses contre le Mouvement Ennahdha", a lancé Laârayedh.
"Le dénommé Mustapha Khedr que le collectif de défense de Belaïd et Brahmi a évoqué lors de la conférence qu’il a donnée aujourd’hui, avait été arrêté en 2013 par les autorités sécuritaires sous les gouvernements de la Troïka", a-t-il souligné.
"Ce dernier a été condamné à 8 ans de prison et est encore sous les verrous", a-t-il tenu à préciser.
Dans un communiqué rendu public mardi, Ennahdha a démenti catégoriquement que le mouvement se soit adonné à toute activité en dehors de la loi régissant les partis.
A ce propos, il a dénoncé les tentatives de désinformation, d’argumentation fallacieuse et d’instrumentalisation d’un dossier judiciaire qui remonte à 2013, faisant remarquer que la justice a déjà rendu son verdict dans cette affaire et que l’accusé Mustapha Khedr n’a aucun rapport avec le Mouvement Ennahdha.
"L’affaire des martyrs Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi est actuellement entre les mains de la justice, et le Mouvement Ennahdha a la confiance totale en la justice, en son indépendance et en sa capacité à révéler toute la vérité dans cette affaire", a-t-il affirmé.
"Le Front populaire n’a rien d’autre à faire que d’investir dans le sang des deux martyrs pour cacher ses échecs successifs lors des précédentes échéances électorales et son incapacité à proposer des programmes pertinents au peuple tunisien", a-t-il conclu.